Léa Bayekula, la sprinteuse belge qui transforme le plomb en or
Cet été, Léa Bayekula, la sprinteuse de 29 ans nous a décroché deux médailles d’or aux Paralympiques de Paris. Avec maintenant dans son viseur Los Angeles 2028, l’athlète nous confie son secret d’alchimiste pour transmuter la rage en courage. Par Anne-Sophie Kersten.
Une fois n’est pas coutume, c’est Léa Bayekula, notre GAEL Guest, qui vient chez nous pour cette interview. L’agente de Léa.de.Belgique — son nom sur Insta — nous a confié que la jeune femme aimerait visiter la rédaction. « L’univers des magazines féminins l’intéresse. » Moi qui, après de tels exploits sportifs, m’attendais à une athlète assertive, peut-être même directive, je perçois dans sa voix posée, dans ses grands yeux francs fardés de rose, une force délicate, une puissance tranquille. « Je peux filmer ? » Mais bien sûr, Léa, tout l’honneur est pour nous.
Tu voulais voir la rédaction…
Léa Bayekula: « Oui, j’ai fait trois ans de graphisme à l’école Le 75 à Woluwe. À 13 ans, je lisais des magazines féminins, dont Amina, le seul avec des mannequins noires à qui m’identifier. Je cherchais les castings. Comme on me renvoyait souvent que mon visage et mes yeux en amande avaient quelque chose de spécial, je me disais que j’avais une chance. À part l’école, je ne faisais pas grand-chose de ma vie d’ado. Puis, juste avant mes 15 ans, mon père décède. C’est à cette époque que je suis contactée, via les réseaux sociaux, par Samir, une chouette personne qui me propose d’intégrer une association proposant des activités à des personnes porteuses de handicap. »
Qu’en penses-tu alors?
Léa Bayekula: » Au début, je suis un peu perplexe car les assos, c’est pas trop mon truc. J’aime quand il y a vraiment un côté inclusif. Dans la rue, les gens sont mélangés, n’est-ce pas ? Mais j’accepte car il y a plusieurs activités comme cuisine, bricolage…, et aussi basket. J’en ferai trois ans. Trois années superbes qui m’aident surtout à forger mon caractère et à réaliser, lors des matchs, que j’aime la compétition. «
C’est ça qui te porte alors ?
Léa Bayekula: » Ce qui me fait accrocher, c’est mon pote Elfie, avec qui on rigole comme des fous. On se lance des défis : « Le premier arrivé à la bouche de métro ! » Il m’apprend à descendre les escalators en chaise, dont celui de l’UGC De Brouckère, vraiment très raide. Quand une personne arrive en retard au basket, il doit faire des « suicides », des tours de terrain. Étant la seule fille de l’équipe, je n’ai pas à les faire, alors que je trouve ça top, car ça améliore la vitesse. Alors je les fais aussi. «
Tu as déjà la niaque.
Léa Bayekula « Sûr ! La niaque de ce que j’ai vécu enfant, qui me donne une force, l’envie de tout défoncer, de répondre : « Ah ouais, pourquoi tu me dis non si je peux ? ! » Et puis, il y a cette journée de détection de talents dans les disciplines paralympiques par la Ligue handisport francophone. Et je découvre l’athlétisme, ainsi qu’une athlète belge incroyable, Marieke Vervoort. Elle me montre comment utiliser un fauteuil d’athlétisme, un wheeler. Là, je me dis : « C’est ça que je veux faire. »
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