Meet our Guest: Salvatore Adamo, icône tendre
En 60 ans de carrière et bientôt 80 ans sur Terre, ce fils de mineur immigré de Sicile est devenu un symbole national. Comme si, sur plusieurs générations, les Belges s’étaient reconnus dans son humilité non feinte, sa discrétion, sa sensibilité, mais aussi son talent. Par Isabelle Blandiaux. Photos: Laetizia Bazzoni.
Salvatore Adamo en vrai
Sa vie ressemble à un roman. Intense, riche en rebondissements, coups du sort et rêves éveillés. Lorsque Salvatore Adamo nous narre son existence en tous points hors normes, il se connecte sans difficulté à l’enfant qu’il a été et qui a immigré en Belgique à 3 ans avec ses parents pour fuir la grande misère sicilienne. Et pour cause, ce bambin-là vit toujours en lui, à près de 80 printemps. L’auteur-compositeur-interprète prolifique revendique même une forme de candeur éternelle, d’innocence, une intuition puissante. Et une dose massive de tendresse. Sa douce sincérité a touché le public en plein cœur, de Bruxelles à Paris, de Tokyo, où Tombe la neige en japonais est devenu un hymne traditionnel, à Santiago du Chili, où — comme chez nous — il remplissait les salles et déclenchait l’hystérie collective dans les sixties. Comme lorsqu’une foule de 50 000 personnes a porté sa voiture à bout de bras, et lui dedans, à sa descente d’avion en 1967... « J’ai vécu cela avec l’impression d’être dans un songe », se souvient-il aujourd’hui. Il a parfois concurrencé les Beatles au sommet des charts, a écoulé 100 millions de disques en 60 ans de carrière.
« Les mots et les airs de Salvatore Adamo résonnent en nous comme des madeleines de Proust, qui marquent les temps de nos vies au fil des décennies »
Or, adolescent, il rêvait d’abord d’être footballeur, puis journaliste. Et il continue à écrire des chansons nuit et jour. Comme si sa vie en dépendait. Sa mémoire est intacte, au point de nous réciter de tête, au cours de cet entretien chez lui, ses vers favoris de Musset. Sa peine d’avoir vu partir son père beaucoup trop tôt aussi. Un drame qui l’a propulsé dans un rôle de père symbolique impossible à tenir, à l’égard de ses six petits frère et sœurs. À ses trois enfants, comme à ses petites-filles, il a transmis son amour de la musique. C’est ma vie, La Nuit, Mes mains sur tes hanches, Les Filles du bord de mer, Inch’Allah... Les mots et les airs de Salvatore Adamo résonnent en nous comme des madeleines de Proust, qui marquent les temps de nos vies au fil des décennies.
AUTOBIO EN 3 DATES
14 février 1960 « C’est la première fois que je suis passé à la radio, en tant que vainqueur à l’applaudimètre d’un crochet de Radio Luxembourg, auquel je m’étais inscrit en cachette de mon père et duquel j’avais d’abord été éliminé, avant d’être repêché par un membre du jury. C’est aussi la date de naissance de ma cinquième et dernière sœur, Tina. »
5 mai 1960 « Ce jour-là, j’ai enregistré mon tout premier disque. J’écrivais en français, mais on m’avait demandé des chansons en italien, parce qu’on était à l’époque de Rocco Granata (Marina). Mais le succès n’a pas été au rendez-vous. Les deux chansons s’appelaient Se Pensi A Me sur la face A et Perché sur la face B. »
1er novembre 1963 « Le jour de mon 20e anniversaire, je jouais pour la première fois de
ma vie en vedette. Et ce, à l’Ancienne Belgique. Avant cela, j’étais toujours la surprise de la soirée, en première partie de quelqu’un d’autre. J’ai tenu à ce que pour mes 80 ans, je sois au même endroit. Cela a été difficile parce qu’on a dû déprogrammer d’autres concerts, mais on y est arrivés. »
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