Loïc Nottet: « Aujourd’hui, je m’excuse un peu moins d’être là »
Petit, Loïc Nottet rêvait de danser comme Michael Jackson pendant que son papa l’imaginait plus en pro du ballon rond. Sorti de sa chrysalide, le kid de Charleroi se confie sur son enfance, qu’il n’a jamais vraiment quittée. Interview: Isabelle Blandiaux. Photos: Laetizia Bazzoni.
Les confidences de Loïc Nottet
Cela fait déjà sept ans que tu t’es présenté à The Voice. Si tu pouvais remonter le temps et rencontrer le Loïc de l’époque, tu lui dirais quoi ?
D’écouter son instinct. De ne pas douter malgré ce que disent parfois les autres et de faire les choses à sa manière. J’y suis parvenu, mais ce n’est pas évident quand on débute.
Tu sens que tu as beaucoup changé depuis lors ?
Je pense qu’aujourd’hui, je m’excuse un peu moins d’être là. J’étais très timide. Cela m’empêchait d’exister pleinement. Je disais toujours ce que je pensais à mon équipe, mais je n’osais pas prendre la parole librement en public, contrarier les autres. Sans cette timidité, j’aurais pu mener un combat plus grand contre le harcèlement, que j’aborde dans Selfocracy. Parce que je sais que le harcèlement scolaire est violent et j’ai la chance de ne pas l’avoir vécu trop fort. Je voulais trop plaire à tout le monde. Je n’osais même pas me lâcher capillairement, affirmer mon style. Or, je me rends compte avec le temps que c’est en étant plus clivant qu’on arrive à grandir. On m’avait déjà proposé d’être coach à The Voice depuis environ trois ans, mais j’avais refusé. Cette année, je me sentais prêt.
Comment vis-tu cette expérience de l’autre côté du miroir ?
C’est très bizarre parce que j’y montre le Loïc du quotidien. Celui qui déconne. L’enfant, en fait. Je me considère comme un gosse qui saute dans tous les sens, qui monte sur le fauteuil... Je pense que je suis hyperactif. Et j’ai toujours le besoin de bouger. Je n’avais pas montré ça avant, parce que j’étais derrière mon micro. Cela a d’ailleurs été pour moi une grosse crainte. J’avais peur que les gens ne m’aiment pas, pour être honnête. Après les retours que j’ai reçus, je suis rassuré.
« Depuis toujours, il n’y a que quand je crée que je me sens vraiment en vie. »
Tu rêvais de quoi, quand tu étais enfant ?
À la base, je rêvais de créer des costumes pour le cinéma, idéalement au côté d’une Colleen Atwood, qui travaille avec Tim Burton. Je voulais d’ailleurs étudier le stylisme à La Cambre à Bruxelles. Petit, je découpais mes vêtements pour les réassembler autrement. Mes parents allaient souvent à des soupers et après le repas, je prenais toutes les nappes en papier pas trop abîmées et je les transformais en une robe pour la petite sœur d’un pote. Les convives attendaient ce moment. Je chantais aussi dans ma chambre, mais je ne savais pas si j’avais une voix. Je dessinais, je peignais, j’écrivais... Depuis toujours, il n’y a que quand je crée que je me sens vraiment en vie. Quand je mets au monde un truc qui sort de ma tête.
Photo (c) Laetizia Bazzoni.
Quel a été le rôle joué par la danse dans cet éveil artistique ?
Quand j’ai commencé la danse à l’âge de 9 ans, je suis monté sur scène et je me suis rendu compte de la magie que cela représentait pour moi. Une autre dimension. C’est comme un bouclier. Comme si rien ne pouvait m’y atteindre, alors que pour certains, c’est justement une mise en danger. Moi, je m’y sens bien, à l’abri, fier de moi parfois. Ce qui n’arrive pas souvent. Un autre moment de satisfaction immense : quand je compose une chanson que j’aime.
« Je passais des heures devant le miroir aussi, j’essayais d’y entrer parce que j’étais persuadé qu’il y avait une dimension parallèle. »
Avant de danser, tu as d’abord dû passer par la case football...
Oui, mon papa voulait que je fasse du foot. J’ai accepté sans vraiment vouloir. Je dansais souvent à la maison. Un samedi matin, je regardais la télé : en voyant le court métrage Ghosts de Michael Jackson, j’ai dit à ma maman que c’était ça que je voulais faire. Mon papa refusait que je prenne des cours de danse. Au final, ma maman m’a inscrit en cachette. Mon papa l’a appris et ça ne lui a pas fait plaisir. Mais quand il est venu me voir à mon spectacle de fin d’année, il a compris. Il ne m’avait jamais vu aussi heureux sur un terrain de foot. Dans la foulée, j’ai fait un gros rejet du ballon rond. À l’époque où je dansais en parallèle, c’était assez chaud dans les vestiaires. Certains enfants répétaient ce que leur papa disait sans vraiment comprendre et j’ai entendu beaucoup de choses. Je pense que je parlerai toujours du jugement et de la peur d’être soi-même dans mes chansons, parce que cela m’a construit. J’ai grandi avec ça. Si, à ma petite échelle, je peux aider les enfants qui sont critiqués, c’est bien.
Tu es enfant unique, tu étais solitaire ?
J’étais souvent dans ma chambre tout seul, oui. J’y rentrais par surprise pour voir si mes jouets avaient bougé, étaient vivants comme dans Toy Story. Parfois, j’allais jouer dans la rue, où j’avais des potes. Mais pas en semaine : je rentrais un peu plus tard que les autres parce que mes parents travaillaient, donc je restais à la garderie. Je passais des heures devant le miroir aussi, j’essayais d’y entrer parce que j’étais persuadé qu’il y avait une dimension parallèle. Dans un Disney, j’ai entendu la phrase « Les murs ont des oreilles » et cela m’a beaucoup parlé. Du coup, j’essayais d’entendre ce que les murs avaient à me dire (sourire)...
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