Enfance, vie de famille: Kody se raconte, côté privé
Si l’humoriste belge cartonne aujourd’hui, il a commencé par des études très sérieuses, un peu pour rassurer ses parents qui ne rigolaient pas avec l’éducation du petit. Et dûment diplômé, il a fait ce qu’il avait vraiment envie de faire. Notez, il aurait été un commercial très drôle, mais ce chemin tout tracé, ça ne le bottait pas. Par Florence Hainaut. Photos: Laetizia Bazzoni.
Cet article fait partie de notre dossier spécial consacré à Kody dans le GAEL d’avril. Pour y accéder, il suffit de vous inscrire gratuitement ci-dessous!
Kody en vrai
Depuis qu’il est adolescent, Kody sait qu’il veut monter sur scène. Il a eu une éducation stricte, un père diplomate fan de Jean-Paul Belmondo, une grande famille, toujours très soudée aujourd’hui, mais il préfère ne pas trop parler de sa vie privée. Aucune photo de sa fille sur Internet, par exemple. On sait juste qu’il est un papa très poule. Pour les téléspectateurs du Grand Cactus (RTBF), il y a un avant et un après Kody. Qui aujourd’hui peut voir Gérard Depardieu sans que l’image du sketch de l’humoriste ne vienne insidieusement se superposer à l’originale ? Idem pour la reine Fabiola. Et Céline Dion. Et puis Belmondo, surtout. Le modèle ultime que l’humoriste a eu la chance de rencontrer et de faire rire en l’imitant.
« Parce que oui, en vrai, Kody est drôle. Mais il ne cherche pas à faire le show. Il est surtout timide, très poli, prévenant »
Parce que oui, en vrai, Kody est drôle. Mais il ne cherche pas à faire le show. Il est surtout timide, très poli, prévenant. L’antistar par excellence. Il ne cherche ni à séduire ni à bluffer. Il s’inquiète de savoir ce qu’on veut boire, dans ce grand café lumineux où il nous a donné rendez-vous. Est-ce qu’une heure, ça va, ce n’est pas trop court ? Est-ce qu’il a bien répondu, on a tout ce dont on a besoin ? Un lift pour le retour, peut-être ? (On a dit oui.) En vrai, Kody est certes drôle, mais il n’est pas qu’un farceur. Et puis pour l’être, il a bossé. Il suffit de regarder sur YouTube son imitation d’Eric Zemmour pour voir l’impeccable, et sans doute ardu, travail de mimétisme qu’il a réalisé. Son rêve, depuis toujours, c’est le cinéma. Il a joué dans quelques films, des petits rôles souvent. Mais il est patient, son heure viendra. En attendant, il termine l’écriture d’un nouveau spectacle et réalise des documentaires salués par la critique. Ça vous étonne ? On vous avait bien dit qu’il était plus complexe que son image de rigolo.
Quand on tape ton nom sur Google, la barre de recherche propose spontanément trois termes : « Kody + vie privée », « Kody + Belmondo » et « Kody + salaire ». Je te propose donc qu’on réponde aux questions que les gens se posent sur toi.
Allez, c’est parti alors.
Kody + vie privée ?
Tout ce dont je déteste parler ! Ma vie privée... que dire ? Ma vie privée, c’est une vie calme, pas trop d’excès, j’aime bien voir mes amis, faire un peu la fête et voilà, j’essaie d’être un papa. Ma fille m’éduque.
Elle a quel âge ?
Elle a 4 ans. Par contre, je dois parfois un peu jongler pour la voir. Ce métier est tellement présent dans ma vie qu’il fait presque partie de ma vie privée, ce qui est parfois un avantage et parfois un problème.
Qu’est-ce que tu veux dire par « Ma fille m’éduque » ?
Les enfants nous éduquent. Elle m’enlève mes peurs et mes doutes parce que je suis obligé de prendre des décisions, je dois marcher sur les passages cloutés, au sens propre comme au sens figuré. L’autre jour, elle m’a surpris, elle me demande super poliment si elle peut avoir un chocolat, alors que la veille elle s’est servie sans demander. Donc elle sait qu’il faut demander. On dirait qu’elle décide quand je dois la gronder... Clairement, l’éducation, ça se fait à deux.
« Je me sens de cette équipe-là. Sans complexes et sans devoir m’excuser de pratiquer un humour populaire, mais avec aussi une attirance pour les trucs plus pointus. »
Et tu y trouves un équilibre ?
Oui, une vraie stabilité, ça ramène les pieds sur terre. Même si ça n’est pas toujours confortable ! Tu te mets à penser au futur et avoir peur. Je n’arrête pas de me dire : « Et si demain je ne suis plus là, et si sa mère n’est plus là, que va-t-il lui arriver ? Est-ce qu’elle sera à l’abri, assez armée pour affronter la vie ? » Et ça vient en plus de toutes les questions que je me posais pour moi. Ça laisse peu d’espace. Sauf pour ma psy !
Deuxième suggestion de Google : Kody + Belmondo.
Belmondo, c’est l’une des personnalités que j’ai incarnées dans l’émission Le Grand Cactus, l’une des vidéos qui a fait le plus de vues, on m’arrête partout dans le monde, de la France au Sénégal, pour m’en parler. Après ce passage, un ami de l’école m’a envoyé un message pour me dire que je faisais Belmondo depuis que j’avais 15 ans et qu’il était temps que le grand public sache enfin ! Ce comédien m’a toujours fasciné, j’aimais son côté aventurier, puis j’ai appris à connaître l’acteur dans des films d’auteur. Ce type a réussi à convaincre un public intello et un public populaire avec une classe, une décontraction et un sourire. Je me sens de cette équipe-là. Sans complexes et sans devoir m’excuser de pratiquer un humour populaire, mais avec aussi une attirance pour les trucs plus pointus.
Tu l’as rencontré, non ?
Oui ! Il y a deux ans, je reçois le coup de fil d’un agent qui me dit : « Si jamais vous êtes à Cannes, il voudrait vous rencontrer. » Je n’étais pas du tout à Cannes, mais j’y suis arrivé en un temps record. J’ai passé une journée et une soirée avec lui, on s’est super bien marrés. Une des choses qui m’ont énormément touché, c’est qu’il avait été victime d’un AVC, comme mon père. Et voir ce mec qui reste fort, avec une bonne poigne, qui a lutté pour vivre avec... C’était pile au moment où mon père venait d’en avoir un. Ça m’a donné de l’espoir. Faut dire que j’ai découvert Belmondo avec la collection de VHS de mon père, il avait tous ses films. Passer des moments d’intimité avec lui, le faire rire en l’imitant, être adoubé par l’idole, c’est quand même une belle expérience.
Ton père est décédé depuis...
Oui, c’était en novembre 2019. Il était la figure paternelle par excellence, le patriarche. Il a toujours rassemblé autour de lui. C’était un vrai séducteur, une forte personnalité. Il avait une incroyable éloquence, un don pour raconter des anecdotes, de l’humour et une culture du silence dans le récit qui le rendaient magnétique. Lui et moi, on se comprenait sans se parler. Je suis content qu’il ait vu mon évolution, mon travail. Et qu’il ait été fier de moi.
« J’ai fini mes études, puis j’étais bon pour bosser comme commercial. Et là, grosse claque, je me suis demandé ce que je foutais là... »
Ton père était diplomate, tu as eu une éducation de fils de diplomate. L’humour, ça n’était pas le chemin tout tracé.
C’est sûr ! Je suis allé à l’école au très chic Collège Cardinal Mercier. En 3e secondaire, j’ai découvert le théâtre et ça m’a parlé. Je savais que c’est ça que je voulais faire, mais je me suis dit qu’avec un père diplomate, ça n’allait pas être simple. Alors j’ai fait Sciences Po à l’UCLouvain, mais je sentais bien que ça n’était pas pour moi. Ce qui m’excitait le plus, c’était de participer au spectacle de la fac. J’ai fait une passerelle en commerce extérieur, j’ai fini mes études, puis j’étais bon pour bosser comme commercial. Et là, grosse claque, je me suis demandé ce que je foutais là...
Et tu t’es lancé dans l’humour...
Oui, mais en me disant que ça pourrait m’amener au cinéma, parce que c’était ça, mon rêve. Ce parcours, c’est celui de pas mal de grands comédiens américains, comme Eddie Murphy et Robin Williams.
Comment tu as annoncé ça à ton père ?
J’étais déjà adulte, j’avais un job. Je n’ai pas eu besoin de l’annoncer, mais j’ai commencé un peu en schmet. Je connais un humoriste qui a attendu que son père disparaisse pour se lancer. Ça, je ne voulais pas. Au début, il a été très sceptique, mais pas totalement contraire. Il avait dit à un de mes cousins : « Il a choisi de faire rire les gens, pourquoi pas ? » Puis il voyait que je faisais ça sérieusement, que les gens accrochaient.
Il t’a vu sur scène ?
Oui, plein de fois. La première fois, il ne m’a rien dit, il est parti après le spectacle sans un mot. L’angoisse... Avec le temps, il est revenu, il a emmené ses amis. Et ça m’a aidé. Je me suis dit : « Si cet homme-là me suit là-dedans, alors il faut que je fonce. » Puis il a fait plusieurs AVC, sa santé s’est détériorée et ça m’a encore plus motivé, parce qu’on ne sait pas ce que la vie nous réserve.
Tiens, dans l’éducation de ta fille, qu’est-ce que tu fais différemment de lui ?
Comme il travaillait énormément quand j’étais petit, notre proximité est venue assez tard. Avec ma fille, on parle beaucoup et de sujets qu’on n’abordait pas quand j’étais gamin. Les parents africains ont parfois une pudeur qui les empêche de parler de tout avec leurs enfants.
Et il y a des choses que tu fais comme lui ?
J’étais un enfant malade, asthmatique, souvent à l’hôpital, très timide. Il m’a beaucoup couvé. Et ça, je le reproduis. Quand ma fille monte les escaliers, je suis dans tous mes états. Quand elle court à côté d’une table, je panique. Je suis trop papa poule. Je sais que ce n’est pas génial, mais ce n’est pas de ma faute, j’ai peur !
Ta fille t’as déjà vu sur scène ou à la télé ?
Oui, elle commence à comprendre. Par contre, quand elle aura 10 ans et qu’elle verra les archives de son père déguisé en Céline Dion, elle me trouvera super ringard, je ne pourrai pas aller la chercher à l’école parce qu’elle aura honte. Ça, je le sens venir. Mais elle est super, elle fait déjà des blagues. L’humour, c’est de l’intelligence, je cultive ça chez elle. Ce serait le seul héritage utile. Le reste, c’est du matériel.
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