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Métier de rêve: rencontre avec une photographe belge spécialisée dans les défilés de mode

Laura Swysen

De Dries Van Noten à Raf Simons, le monde entier nous envie nos créateurs. Mais nos compatriotes brillent aussi dans les coulisses des défilés.  Par Catherine Kosters, avec la collaboration de Kathleen Wuyard.  

« Durant la semaine de la mode, on entend toujours quelqu’un parler flamand dans les coulisses. La mafia belge est partout », sourit une maquilleuse anversoise qui appartient elle-même au gang en question. Lequel est plutôt un groupe de créateurs talentueux qui ont atteint le sommet du monde de la mode et sans lesquels un défilé ne serait qu’un tas de vêtements. En coulisses, ils assurent le maquillage, le stylisme, la production et la photographie qui font le succès de chaque show. Mais contrairement aux stylistes et aux mannequins, ils ne sont pas souvent sous les feux de la rampe, bien qu’ils soient pourtant des stars dans leur domaine. Ce mois-ci, on vous propose un gros plan sur trois talents belges. Première rencontre avec Oriane Verstraeten.

Les Belges à Paris

« Mon premier défilé a été celui d’AZ Factory, la marque d’Alber Elbaz. Il venait tout juste de mourir et quarante-quatre autres créateurs lui ont rendu hommage. J’avais obtenu le poste grâce à mon réseau élargi et quand je suis descendue du Thalys, je n’avais aucune idée de ce qui m’attendait. Je me suis aussitôt retrouvée face à des top models comme Anja Rubik et Adut Akech », se souvient Oriane Verstraeten.

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Âgée de 26 ans et basée à Anvers, elle a obtenu son diplôme en septembre 2021 et participait déjà à la Fashion Week à Paris un mois plus tard. Grâce à son approche analogique aiguisée, elle est devenue en quelques années une photographe de coulisses très recherchée. Et travaille aujourd’hui sur commande pour de grandes maisons de couture ainsi que pour des magazines internationaux. « Je photographie les mannequins juste avant le début du défilé. Parfois, je n’ai pas plus de sept minutes pour les immortaliser. C’est pourquoi je mémorise tous les regards et les visages à l’avance. Lorsque le moment est venu, je sais exactement ce que je veux capturer. »

Le réseautage est très important dans le secteur de la mode, c’est pourquoi il vaut mieux ne pas refuser une invitation à un dîner pendant la Fashion Week. Une after-party est professionnellement moins intéressante – on n’est pas là pour bavarder.

Pour se faire sa place, elle confie qu’il faut connaître les bonnes personnes. Et qu’un lien avec la Belgique ne fait jamais de mal. « Lors de la Fashion Week de Paris, on retrouve de nombreux compatriotes talentueux, des anciens élèves de l’Académie d’Anvers aux noms établis dans le monde du maquillage, du stylisme ou encore de la production. Sans oublier les mannequins. Lorsque j’ai vu Hanne Gaby Odiele pour la première fois, j’étais assez impressionnée, mais elle m’a d’emblée mise à l’aise. Les Belges se soutiennent mutuellement », assure Oriane. Et il n’y a pas de meilleur endroit pour renforcer les liens nationaux que le bar. « Le réseautage est très important dans le secteur de la mode, c’est pourquoi il vaut mieux ne pas refuser une invitation à un dîner pendant la Fashion Week. Une after-party est professionnellement moins intéressante – on n’est pas là pour bavarder », rit-elle.

Stress et paillettes

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Malgré les soirées légendaires, travailler dans les coulisses des Fashion Weeks n’est pas aussi glamour qu’il y paraît, et nécessite même des nerfs en acier. « Il arrive que l’on ne reçoive la confirmation d’un défilé qu’une heure à l’avance et que l’accréditation soit retirée parce qu’un magazine plus important s’y intéresse. En outre, après les défilés – j’en enchaîne parfois jusqu’à six par jour –, mon travail n’est pas terminé. Je dois encore développer mes rouleaux de pellicule et scanner mes photos. Dans ma chambre, je les sélectionne et les retouche jusque tard dans la nuit, en tandem avec un collègue basé en Belgique et disponible 24/7, car analogique ou non, douze heures après le défilé, les images doivent être prêtes », pointe notre compatriote.

Et en plus d’être rapides et flexibles, les photographes de coulisses doivent également être forts mentalement. « Parfois, on vous aboie dessus. On se sent alors comme un paparazzi alors que l’on travaille pour un grand magazine. » Et de partager qu’un des moments les plus difficiles de sa carrière s’est déroulé lors d’un défilé pour une marque belge dont nous préserverons l’anonymat.

« Le chaos régnait en coulisses. Les tenues devaient être photographiées pour le lookbook, mais on nous ignorait radicalement. Lorsque nous avons essayé de nous adresser à un mannequin, le partenaire du styliste est devenu fou. Il a crié : “Tout le monde dehors, maintenant !”, alors que nous essayions simplement de faire notre travail. Mes collègues de Vogue et d’i-D voulaient tenter de se cacher, mais on nous a fichus à la porte. C’était très dur. Il faut savoir que l’on travaille souvent gratuitement lors de la Fashion Week. Seuls les photographes internes à une maison sont rémunérés. Ceux qui travaillent pour des magazines le font uniquement pour le prestige. Quand on est traité en prime de manière aussi irrespectueuse, ça fait beaucoup. »

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Pour Oriane Verstraeten et ses collègues, travailler dans les coulisses des Fashion Weeks est un investissement, certes, mais avec un immense potentiel de rendement. Les clichés réussis des coulisses font le tour du monde et permettent de décrocher des emplois importants — et bien rémunérés — par la suite. Et outre l’aspect financier, il y a une autre raison pour laquelle les Fashion Weeks restent magiques : « Il n’y a rien de tel que l’adrénaline et la satisfaction que l’on ressent lorsque l’on obtient un cliché parfait en moins de dix minutes. Si tout se passe comme prévu, c’est comme si on avait face à soi un éditorial avec les meilleurs looks, modèles et maquillages du monde. »

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