(c)Liesbet Peremans

La Dalmatie: ce petit coin de paradis croate à 2h de vol de la Belgique

Cette région historique des Balkans possède l’un des plus beaux littoraux d’Europe. Avec ses petites îles paradisiaques encore authentiques, on ne peut rêver meilleure destination pour naviguer et faire le plein de splendeurs. Par Annelore De Donder, avec la collaboration de Marie Aubin. Photos : Liesbet Peremans.

On a parfois l’impression de commettre un péché en écrivant un article, tant on voudrait préserver certains endroits idylliques et leur beauté inexplorée. Mais on ne peut en même temps que souhaiter à tout le monde de connaître la magie du vent chaud dans les voiles, de la baignade dans des eaux cristallines et de la tranquillité d’une mer sans fin, d’une cuisine authentique et d’habitants qui vous accueillent à bras ouverts dans leurs baies encore peu peuplées. Voici donc notre ode à une croisière qui risque de terminer sur votre bucket-list : le long de la côte dalmate, parmi les quelque 1 200 îles que compte la Croatie.

Sur les traces de Game of Thrones

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Pour ce qui est de l’authenticité, le ton est donné d’emblée à Šibenik, qui — contrairement aux autres villes de l’Adriatique — n’a pas été fondée par les Grecs ou les Romains, mais par les Croates locaux. L’Oceanis 50 Pika II, un voilier bien équipé mis à notre disposition, sera notre hôtel et notre moyen de transport pour les prochains jours. Avant de prendre la mer, nous visitons cet ancien village de pêcheurs devenu prospère grâce au monopole du sel de mer à l’époque de la domination vénitienne. Une richesse maritime qui apparaît en toile de fond dans la cinquième saison de Game of Thrones — on y voit Arya Stark arriver en bateau, dans la ville marchande que l’on nomme Braavos.

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À cette époque glorieuse, 13 000 personnes y vivaient ; aujourd’hui, le centre médiéval ne compte plus que 3 000 habitants. Ce n’est plus une métropole depuis bien longtemps, mais cette belle endormie du Sud se réveillera très certainement bientôt comme un haut lieu touristique et promet de devenir la nouvelle Dubrovnik.

1 200 îles croates

« Avec des eaux chaudes, une infrastructure portuaire nickel, une assistance prête à intervenir dans un délai maximum de deux heures et une abondance de petites baies, la Croatie est le pays rêvé des amateurs de voile », nous dit Vedran (en anglais, que les Croates parlent tous), de la société NCP & Mare, au cours du dîner chez Bronzin, où nous nous régalons d’un sublime risotto à l’encre de seiche servi avec des fruits de mer. Après le dessert, un gâteau au fromage typique, il nous emmène sur notre embarcation. Des quelque 1 200 îles croates, plus de 300 se trouvent dans la baie de Šibenik. Ce n’est pas un hasard si c’est ici qu’a été construit le premier port pour mégayachts. Avec ses 15,42 mètres, le nôtre, bien qu’il nous convienne parfaitement, est plutôt modeste.

Nous commençons la découverte de notre étroite cabine — l’une des six du bateau — en nous cognant la tête contre le plafond bas, ce qui nous arrivera encore souvent. Nous éteignons les lumières, plus rien ne bouge, c’est à peine si nous sentons le mouvement de l’eau. Seul Ante, notre skipper, crée quelques vagues en fermant pour la nuit.

Corail rouge sang

Le lendemain matin, avant de mettre le cap sur l’île de Zlarin. Nous quittons les eaux saumâtres de la baie de Šibenik, entrons dans la mer salée et pénétrons sur le territoire de l’île par un chenal étroit et sinueux. Ante est né et a toujours vécu à Šibenik est habitué à ce qui s’offre à nous comme un spectacle jamais vu : le grand bleu de l’Adriatique sous un soleil radieux. Pendant l’été 1936, un certain Edward est passé par ici, le roi Edward VIII pour être précis, accompagné de son amoureuse, la socialite Wallis Simpson. Leur passage en Croatie a rendu célèbre non seulement Wallis, mais aussi la région et son potentiel touristique. Et c’était amplement mérité : Zlarin est une véritable carte postale de 8 kilomètres carrés, certes un peu fanée, mais cela ne lui donne que plus de charme. On n’est pas dans une image commerciale immaculée, mais dans de l’authentique, avec des maisons pastel imparfaites, des bateaux de pêche sans prétention, zéro hôtels et seulement une petite paire de bars.

On nous raconte comment ses ancêtres récoltaient, traitaient et commercialisaient le corail rouge local. Un bijou déjà très convoité au 15e siècle : le corail rouge est entièrement constitué de squelette, c’est pour cela qu’il est si solide et précieux. Le patrimoine culturel le plus important de l’île est en même temps un bain de sang écologique. Après des siècles de prise, le corail rouge a disparu, avec les conséquences que l’on sait pour la biodiversité. Le musée est d’ailleurs plus un lieu de sensibilisation que de mise à l’honneur.

Humour croate et îles exclusives

Ante nous en apprend de belles, tandis que nous nous préparons à visiter les îles Kornati, un archipel de 140 îles au large de la côte nord de la Dalmatie. Notre skipper rit : « Elles portent des noms très vulgaires, comme Babina Guzica (Cul de grand-mère, NDLR) ou Kurba Vela (Grosse pute, NDLR). » Nous découvrons l’humour croate : quand, à la fin du 19e siècle, des géomètres autrichiens viennent répertorier l’archipel, ils s’amusent à leur fournir les noms les plus improbables, que les scientifiques s’évertuent à écrire correctement. 89 îles sont protégées depuis 1980 et font partie du Parc national Kornati.

Naviguer ici est une expérience presque irréelle. Notre voilier fend silencieusement le paysage de karst calcaire plein de récifs, de falaises abruptes et de grottes. L’aridité du cadre est due à l’approvisionnement de la flotte vénitienne, bien que le terme de déforestation soit plus approprié. « Venise est construite sur du chêne croate », dit-on ici. C’est ce qui a entraîné l’érosion, le surpâturage et l’appauvrissement de la flore et de la faune. Mais il nous reste les dauphins : nous en avons aperçu deux ! Ils étaient trop loin pour parler d’une expérience émouvante, mais c’est tellement gratifiant de voir tout à coup l’aileron tant espéré.

Nous poursuivons ensuite vers le parc naturel de Telašćica et jetons l’ancre dans la baie intérieure de Dugi Otok, la « longue île », la plus grande de l’archipel de Zadar. L’eau calme, les quelques autres yachts au loin, le plat de pâtes et le soleil couchant derrière les rochers : tout contribue à une soirée de bonheur serein.

Léonard de Vinci croate

Nous passons par Prvić, appelée aussi « l’île de Faust ». Pas en référence au personnage de Goethe, mais bien à Faust Vrančić, qui y a vécu. Le « Léonard de Vinci croate » aurait notamment perfectionné le parachute. Et de fait, dans le village pittoresque, sa statue ne représente pas cet homo universalis debout, mais en plein saut.

Nous passons devant des bancs d’huîtres et de moules, à l’ombre de rochers de plusieurs mètres de haut — le paysage du canyon de la rivière Krka est magistral — et nous entrons enfin dans le port de la charmante ville de Skradin, désignée par Bill Gates dans Forbes comme sa destination de vacances préférée. Il n’est apparemment pas le seul milliardaire à être fan : à côté des mastodontes flottants qui y sont amarrés, les maisons sur le quai ressemblent à des miniatures. Le Parc national Krka est une oasis féerique aux sentiers en bois qui ondulent de haut en bas, il y a des centaines de libellules et de grenouilles coassantes. La balade est ponctuée de petits marécages, jolis ruisseaux et vraies chutes d’eau. Parmi elles, Skradinski Buk est la plus impressionnante : d’une hauteur de 800 mètres, l’eau déferle sur 17 cascades plus petites.

Nous prenons notre dernier dîner au restaurant Cantinetta. Le fait que David Skoko — le Sergio Herman croate — y dîne en dit long. Sans chichis, rien que des saveurs pures et mémorables : un plateau de calamars, crevettes et girice (sardines frites). Puis la dorade et le bar grillés, accompagnés de feuilles d’égopode, pommes de terre et oignons. Nous buvons du Bibich provenant du vignoble situé sur la colline voisine et trinquons aux images et impressions qui nous accompagneront encore longtemps.

La Dalmatie en pratique

Y aller

  • Le port de plaisance de Šibenik, en Dalmatie, se trouve à une heure de route de Split comme de Zadar. Le loueur de voiliers peut organiser le transfert de l’aéroport. Le trajet peut se faire en train ou en bus.
  • Le vol de Bruxelles vers Split dure environ 2 heures. Àpd 140 € aller-retour. Les vols sur Zadar partent de Charleroi àpd 82 € aller-retour. Pensez à compenser l’émission de CO2 du transport.
  • Quand partir: En été, la côte dalmatienne est très fréquentée. Pour pouvoir accoster à Zlarin, par exemple, il faut réserver deux jours à l’avance. Les mois de juin et de septembre sont le meilleur moment : il fait calme et pas trop chaud, l’idéal pour faire du voilier.

Sur place

  • NCP & Mare loue de petits et grands voiliers, catamarans et bateaux à moteur dans le port de plaisance de Šibenik. Ils fournissent une assistance 24/7, différentes formules de voile et un service de navette. On peut louer le bateau seul, avec capitaine ou équipage. Pour naviguer seuls, il faut avoir un brevet de navigation.
  • L’Oceanis 50 ‘Pika II est un yacht de 15,42 mètres, avec six cabines pour deux personnes, trois salles de bain avec toilette et douche, une kitchenette avec frigo, cuisinière et four, et une grande salle à manger ; le tout avec air conditionné. Serviettes, draps et wifi sont inclus. Il y a un salon sur le pont avec une douche extérieure à l’arrière et un solarium à l’avant. En mettant le Zodiac (inclus) à l’eau, on a encore plus de place. Àpd 3 350 € par semaine pour 12 personnes maximum. ncp-charter.com.

Pauses incontournables

  • Slalomer entre les 89 îlots du Parc national Kornati est un bonheur, avec un nouveau panorama splendide à chaque virage. Tickets d’entrée sur shop.np-kornati.hr.
  • Dans la réserve naturelle protégée Telašćica, amarrez à Dugi Otok, une des 13 petites îles qui entourent la baie. De là, un chemin de randonnée mène au centre de visiteurs Fort Grpašćak. Lunchez chez Konoba Gospoja sur un quai. Tickets d’entrée sur pp-telascica.hr, grpascak.hr, @ konoba_gospoja_telascica.
  • À Žut, l’une des îles Kornati, savourez un délicieux dîner au restaurant Fešta, avec embarcadère privé.
  • L’île de Prvić est idéale pour flâner. Baladez-vous vers le Memorial Center Faust Vrančić.
  • On peut naviguer sur la rivière Krka jusqu’au Parc national Krka, la plus belle partie. Ne zappez pas la chute d’eau Skradinski Buk ; on l’atteint en bateau d’excursion au départ de Skradin, où est amarré votre voilier. À Skradin, réservez chez Cantinetta pour le repas le plus pur jamais dégusté.

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