On a testé: une semaine pour devenir 100% écolo #1
Du dentifrice maison au sel de mer à la tartine au choco végane avalée dans le train: notre journaliste a voulu voir jusqu’où il pouvait pousser ses efforts pour la planète. La semaine a été longue, très longue. Par Jorik Leemans. Avec la collaboration de Marie Aubin.
Vous voulez vous y mettre aussi? Voici 7 gestes qui peuvent tout changer!
Lundi – De la bonne volonté, mais pas de légumes
9h12: Me voilà au rayon fruits et légumes du supermarché avec mes filets réutilisables. La simple intention de consommer propre me donne déjà un léger sentiment de supériorité morale. Je soupire discrètement lorsqu’un client dans la septantaine emballe ses poivrons dans les tout derniers sachets plastique jetables du royaume (en mars, c’est fini dans les supermarchés belges, ouf pour les océans !). Mon dédain se mue en vague panique lorsque je constate que les chicons qu’il me faut pour ma recette n’existent qu’emballés. Je découvrirai plus tard que la plupart des « plastiques » qui emballent nos fruits et légumes bio sont en fait en matières recyclées ou biodégradables. Pour l’heure, l’écoguerrier en moi refuse de craquer et, à la caisse, je dépasse sans rien acheter le monsieur aux poivrons. Je crois percevoir un léger soupir.
9h56: Après un trajet en tram de 20 minutes, j’entre dans un magasin de vrac et sans emballage. Tout le monde se balade avec des bocaux et des Tupperware... Devant les bacs de noix, graines et légumes secs bio, je prends conscience que cuisiner végane une semaine entière aurait mérité plus d’anticipation.
« On peut même remplir ses bocaux de... ketchup. Un cran trop loin pour moi pour l’instant. »
D’habitude, j’improvise mon repas du soir le jour même. Je n’y connais quasi rien en recettes sans produits laitiers ni viande. Compo- ser mon menu de la semaine s’avérera l’une des tâches les plus compliquées de ce test et plus d’une fois, je serai bien content de pouvoir m’inspirer des recettes et des conseils pour débutants de Yoneko Nurtantio et de sa sœur Gwen, coauteures du livre Les Recettes #Zerogaspi. Pour l’heure, je décide de me rabattre sur des légumes d’hiver connus. J’achète deux bocaux vides, je les tare et les remplis de riz pour risotto et de choco bio. Je dois me pincer en lisant le prix de la pâte à tartiner! Des herbes, de l’huile d’olive, des pâtes: on trouve ici en vrac toute la base pour cuisiner. On peut même remplir ses bocaux de... ketchup. Un cran trop loin pour moi pour l’instant.
12h01: Huile de coco, bicarbonate de soude et gros sel marin: il n’en faut pas plus pour faire du dentifrice, à ce qu’il paraît. Ah oui, une huile essentielle pour donner un petit goût à la préparation, mentionne l’explication exhaustive trouvée sur un blog. L’orange est parfaite pour les enfants, lis-je. Ai-je finalement pris celle-là parce que l’huile de menthe était deux fois plus chère ? No comment.
« Durant plusieurs minutes, c’est comme si je venais de boire cul sec un verre d’eau de la mer du Nord. »
Je me souviens que je-ne-sais-plus quelle reine du zero waste parlait d’une alternative, les tablettes de dentifrice. Pour l’heure, je transfère ma pâte maison de la cuisine à la salle de bain et je décide d’effectuer un brossage test.
12h06: Tellement salé... Durant plusieurs minutes, c’est comme si je venais de boire cul sec un verre d’eau de la mer du Nord. Mes gencives saignent. C’est encore loin, dimanche ?
18h23: Une de vos meilleures amies est accro au spaghetti bolo ? Alors il est de votre devoir de l’emmener dans un resto où il est meilleur qu’ailleurs. Et si ledit restaurant se trouve à 9,3 kilomètres de la maison et que vous n’avez pas le droit de prendre la voiture pendant une semaine, il est de votre devoir de prendre le vélo. Si vous mettez quarante minutes parce qu’il pleut et que le vent s’amuse à être toujours de face, vous avez le droit de verser une larme. Personne ne verra la différence avec les gouttes de pluie qui s’écoulent jusque dans votre cou.
19h04: « Siri, le vin rouge est-il mauvais pour l’environnement ? » Épuisé, je hurle dans mon GSM. Il m’indique les bars les plus proches. Ça, c’est de l’amour.
Mardi – DICTATURE DU THERMOSTAT ET SAGESSE POPULAIRE
8h12: « C’est toi qui as mis le thermostat sur 19 degrés ? » La voix de mon compagnon arrive du living. « On caille, ici. » Pour la paix du ménage, je n’ai pas obligé mon copain à participer à mon expérience écologique. Qu’il se plaigne alors que j’essaie de faire baisser notre consommation d’énergie me vexe. Quand il a le dos tourné, le Che Guevara qui vous écrit descend le thermostat à 18 degrés. Ma vengeance a aussi peu d’impact que mes efforts, comprends-je lors d’un entretien téléphonique avec Wim Thiery, spécialiste belge du climat.
« Il est plus facile et important de changer de fournisseur d’énergie. »
«Il faudrait diminuer drastiquement votre consommation et remplacer tous vos appareils ménagers, m’explique ce professeur de la VUB. Il est plus facile et important de changer de fournisseur d’énergie. On voit sur monelectriciteverte.be qu’il y a une petite poignée d’acteurs du marché qui fournissent 100 % d’énergie renouvelable. Choisir une électricité verte ou grise ne change rien à l’éclairage ou au confort, mais pour le climat, cela fait une différence énorme. Autrement dit: la question ne devrait même pas se poser.»
10h19: Si on fait preuve de créativité, on peut même gagner du temps. Chouette comme nouvelle sagesse populaire, non? J’ai fait mienne la mission de gaspiller le moins possible de nourriture. Un reste de potiron devient une tartinade pour le lunch et une orange ou un citron oublié se transforme (avec un peu d’eau sucrée et des fine herbes) en délicieuse limonade maison. Je prends le reste de pourpier qui traîne dans le frigo et je le mets dans le blender avec un peu d’huile d’olive, de l’ail, des noix et du parmesan. Mon pesto alternatif n’est peut-être pas végane, mais ce serait dommage de jeter un reste de fromage.
16h30: Sur Facebook, je reçois de la pub personnalisée pour des brosses à dents en bambou. Ce petit encouragement de Mark Zuckerberg me donne plutôt des frissons dans le dos.
19h03: « P*** fait froid ici. » Cette fois, ce n’est pas mon amoureux, mais une amie. Elle vient partager mon gratin végane au couscous et regarder les derniers épisodes de La Servante écarlate. « T’aurais pas une petite couverture? » Petit coup d’œil au thermostat. Ah ouais, 18 degrés, j’avais oublié. Ça arrive aux meilleurs des résistants.
Mercredi – LE STRESS DE LA VAISSELLE
7h45: Beaucoup, beaucoup trop salé. Note à moi-même: acheter des tablettes de dentifrice.
12h01: Réception de Nouvel An chez un client. Buffet livré par Deliveroo. Tandis que les premières bulles sont servies dans des gobelets jetables, je file à la cantine. Je reviens avec un verre, une fourchette et une assiette en faïence. « Tout est biodégradable, tu sais », me confie une collègue. Je décide de tenir le cap et je m’en tiens aux options véganes. « Beurk, il y a de la coriandre dans le saumon », soupire un journaliste qui ne supporte pas cette herbe, tout comme moi. Pas si mal, finalement, d’être végane. »
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