Ambre Chalumeau : “Chaque chose de la vie mérite un texte”
Que se passe-t-il quand au délicat passage du monde de l’adolescence à celui des adultes, un événement malheureux vient remettre en cause les certitudes que nous nous sommes forgées ? C’est à une illustration par l’exemple, mêlant la fiction aux expériences vécues que nous convie Ambre Chalumeau, connue pour animer La Brigade dans Le Quotidien présenté par Yann Barthès sur TMC. Un roman de plus, publié par une personnalité du PAF ? Ambre Chalumeau y a beaucoup pensé. Elle y répond. Par Nicky Depasse.
Chroniqueuse culturelle à la radio et à la télévision, vous publiez à présent votre premier roman. C’était presque fatal ?
Ambre Chalumeau: « Je ne sais si c’était fatal mais ça me rappelle cette loi, qui doit être la seule que j’ai retenue de mes cours de maths : « tous les carrés sont des rectangles mais tous les rectangles ne sont pas carrés ». Je pense donc que si tous les grands lecteurs ne deviennent pas des écrivains, tous ceux qui écrivent ont commencé par beaucoup lire. En tout cas, cela a commencé comme ça chez moi. »
Les thèmes de votre roman ne sont pas très joyeux, la souffrance, la résilience, qu’est-ce qui vous a conduit à les explorer ?
Ambre Chalumeau: « Il me sont un peu tombés dessus. L’histoire du départ de ce roman, un jeune homme qui tombe dans le coma d’une manière mystérieuse, est arrivé à mon ami d’enfance quand j’avais 17 ans. La première expérience lourde et grave que j’aie eue à gérer dans ma vie. J’avais en effet eu une enfance heureuse et privilégiée jusque-là. Ce fut une expérience compliquée au moment où je sortais du lycée et commençais des études supérieures.
J’ai vu des certitudes que j’avais sur la vie se fissurer au même moment : des couples que je croyais inoxydables étaient en proie à des turbulences et puis cet ami qui devenait un absent…
J’ai vu des certitudes que j’avais sur la vie se fissurer au même moment : des couples que je croyais inoxydables étaient en proie à des turbulences et puis cet ami qui devenait un absent, me donnaient l’impression de ne plus rien reconnaître autour de moi en un battement de cils. Pour digérer ça, je me suis mise à écrire des scènes, des réflexions, j’y ai ajouté d’autres choses qui me sont arrivées par après dans ma vie et bien sûr de la fiction. Chaque personnage vit ou a vécu au moins une situation qui m’est arrivée. Je suis un peu chez tout le monde. »
Vous lisez beaucoup pour votre chronique dans le Quotidien sur TMC, quels sont les auteurs contemporains ou classiques qui vous portent ?
Ambre Chalumeau: « J’ai été nourrie par les grands auteurs classiques mais ils ont quelque chose d’intimidant quand on veut se mettre à écrire, après les avoir lus : on se dit « à quoi bon écrire un livre, c’est inutile ». Par contre, la lecture des contemporains a ceci de génial qu’elle vous autorise à faire de la littérature avec une langue vivante, on se rend compte que les grands livres n’appartiennent pas nécessairement au passé, qu’ils doivent avoir absolument un sujet gravissime et être écrits dans un style compliqué. Bonjour tristesse de Françoise Sagan a été écrit à l’âge de 17 ans, parle de choses merveilleuses mais dans une langue à taille humaine. Cette lecture a été pour moi une libération. Car oui, il y a de la littérature dans un coeur brisé, la relation d’un père et son fils, une défaite sportive. Chaque chose de la vie mérite un texte. »
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.
Vous pensez un jour ne vivre que de votre plume et abandonner la télévision ?
Ambre Chalumeau: « Là, comme ça, non. On va commencer par voir si mon livre plaît aux gens. Et puis ce sont deux choses très différentes. L’écriture est un exercice de création, un terrain de jeu intimidant mais génial. Ce que je fais dans Le Quotidien est un exercice d’admiration, d’enthousiasme. J’ai la chance qu’on me donne un projecteur pour le braquer sur de jeunes artistes, une actualité que je trouve mériter. C’est extrêmement intéressant et épanouissant comme activité. C’est génial d’avoir un métier qui consiste à documenter le beau. Tant qu’on me permettra de le faire, je continuerai. Peut-être que cela changera avec le temps mais je me sens plus à l’aise dans la position d’admiration que de création. »
Mais vous pensez déjà à un deuxième roman ?
Ambre Chalumeau: « Honnêtement, je ne sais pas du tout. C’est déjà une merveilleuse surprise que l’accueil reçu par ce livre. J’avoue que j’étais très inquiète. Et donc avant d’en tirer de l’orgueil et de la fierté, je suis trop heureuse pour le moment d’être rassurée. Je n’ai rien dans les tuyaux car ce livre n’a pas été écrit par projet mais par plaisir, par envie et par besoin de mettre de l’ordre dans mes pensées. Pour qu’il y en ait un second, il faudra que je retrouve ces trois choses. »
Vous avez eu des craintes, des doutes avec ce livre ?
Ambre Chalumeau: « Bien sûr. Son écriture a longtemps été un secret. Je n’en avais parlé à personne. Et puis tout à coup, des pensées très personnelles deviennent publiques. Je m’y dévoile pas mal dans ces pages. J’ai aussi eu des doutes de légitimité. Ayant la chance de faire un métier public, j’ai rencontré une éditrice qui m’a demandé si j’avais déjà écrit quelque chose. Et donc, je comprends que des gens se disent que je ne suis publiée que parce que je suis à la télévision car je sais qu’il y a plein d’auteurs qui ont écrit de merveilleux textes et qui n’auront jamais la chance de faire ce type de rencontre.
Cette idée me travaille. J’ai posé la question à mon éditrice de savoir si elle aurait publié le même texte, envoyé par une inconnue. Elle m’a répondu que oui. J’ai essayé de me rassurer en la croyant, même si cela restait difficile. Les critiques et les retours de lectures que je commence à recevoir me rassurent heureusement. »
- LES VIVANTS, Ambre Chalumeau, 297P., Ed. Stock.
Plus de belles rencontres
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici