Témoignage: « Je ne veux pas d’enfants, suis-je un monstre pour autant? »
Elles sont toujours plus nombreuses à aller à l’encontre de la tradition familiale et à ne pas vouloir d’enfant. Camille*, 29 ans, nous livre son témoignage.
« Dans un peu moins d’un mois, je passerai le fameux cap de la trentaine. Celui où l’on attend de nous de fonder une famille et voir notre maison se remplir de jouets. Les années passent et mon feed Facebook se retrouve envahi de photos d’enfants. Désormais, aucune sortie entre amis ne se termine sans la fameuse question « Alors Camille, c’est pour quand le bébé?« . Pourtant j’en ai discuté maintes fois avec eux. Aussi loin que je me souvienne, je n’ai jamais eu l’envie d’avoir des enfants. Alors que certaines fillettes rêvent de pouponner depuis qu’elles ont eu leur première poupée, moi, l’idée d’avoir des enfants me rebute.
« La nonne »
Depuis mon enfance, mon absence d’envie de materner choque mon entourage. Je me souviens d’une anecdote, lorsque j’étais en première ou deuxième primaire. C’était la mode des journaux à faire compléter par vos amis. Celui où vous dessinez et répondez à quelques questions bateau. À « que rêvez-vous de faire plus tard« , j’avais osé répondre que je rêvais de voir un jour des dauphins (en pleine nature, pas dans un zoo). Mon amie de l’époque m’avait dévisagée, « Quoi, tu ne rêves pas de fonder une famille? »... Quand j’ai répondu que cela ne me tentait pas, elle s’est moquée de moi et m’a rebaptisée « la nonne ». Une lubie qui, heureusement, n’avait pas duré longtemps.
Bien entendu, cela ne se limite pas aux amis ou aux collègues. Le moindre inconnu se permet d’émettre un jugement sur ma décision, comme si elle n’était pas mûrement réfléchie. Lassée de devoir me justifier, je préfère parfois répondre aux inconnus que je ne peux simplement pas en avoir. Ma famille se pose également beaucoup de questions sur mon choix, surtout mes parents qui se demandent constamment ce qui cloche chez moi. Ce n’est pas un choix environnemental – même si l’avenir de la planète me préoccupe – ou même professionnel, juste une absence d’envie de maternité. Je ne suis pas mal à l’aise avec les enfants, je pense d’ailleurs qu’ils m’apprécient, mais je n’ai aucune envie d’en avoir un « à moi ». Heureusement, j’ai quelques copines qui ont le même point de vue sur la vie que moi, cela permet de relâcher la pression car, dans notre société, ne pas vouloir d’enfant vous transforme souvent en monstre. Si vous ne voulez pas de progéniture, c’est que vous êtes une mauvaise personne ou que vous avez quelque chose à cacher.
« Tu verras avec le temps »
Lorsque vous êtes jeune et que vous ne voulez pas d’enfant, les gens vous répondent souvent que cette envie viendra avec le temps, « quand vous aurez trouvé le bon ». Mais ce n’est pas mon cas. Aujourd’hui, j’ai trouvé ma moitié, mon âme-soeur avec qui je compte partager le reste de ma vie. Heureusement, nous sommes sur la même longueur d’onde en ce qui concerne les enfants. Mon partenaire réfléchit comme moi, il n’a rien contre eux, il n’en a juste jamais eu envie. Nous sommes très heureux comme ça, notre couple a trouvé son équilibre et nous ne voulons le perturber pour rien au monde.
Le cap le plus difficile de ma vie fut certainement lorsque ma mère a compris que mon compagnon et moi n’aurons pas de progéniture. Elle qui a toujours cru que cela se débloquerait quand je rencontrerai le bon, elle est tombée de haut. Je peux comprendre que cela l’affecte, qu’elle rêverait d’avoir un petit-fils ou une petite-fille, mais c’est ainsi, c’est notre décision. Pour les parents, ce désir peut sembler un tantinet égoïste, mais je le trouve altruiste. Pourquoi imposer à un enfant une vie dans un amour contraint? Je ne veux pas élever un enfant pour qu’il se sente non-désiré et ainsi lui imposer mes sentiments négatifs.
J’en profite pour lancer un message à tous les parents: cessez de nous regarder comme des enfants immatures, des couples inaccomplis ou des horribles égoïstes. Ma famille se résume à ma moitié, nous sommes très heureux ainsi. Respectez notre volonté comme je respecte votre envie d’enfanter. «
* nom d’emprunt
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