Frustrée par les limites de son travail, Sophie a repris ses études à 33 ans

Sophie Lemmens est éducatrice. À 33 ans, elle a repris des études pour mieux aider les enfants qui passent par son institution. Photo: Liesbet Peremans.

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Faux départ

« Je suis sortie des secondaires avec un diplôme d’éducatrice. J’ai ensuite étudié pendant deux ans les sciences sociales en haute école, mais je ne suis pas allée au bout de mon cursus. J’ai réussi tous mes examens de première année, à l’exception de deux matières. Je pouvais assister aux cours de deuxième année, mais je devais impérativement repasser ces deux examens. Malheureusement, la philosophie s’est avérée être ma bête noire. Je me suis présentée quatre fois à l’examen, sans succès. J’en avais assez. J’ai arrêté mes études et j’ai commencé à travailler en tant qu’éducatrice.

« Je faisais ce que je pouvais (pour aider les enfants), mais cela ne me paraissait jamais suffisant. »

Le centre dans lequel je travaille s’occupe d’enfants placés. Il s’agit d’une structure intermédiaire et temporaire, entre leur famille biologique et leur nouveau foyer d’accueil. L’âge des enfants varie de quelques mois à douze ans. Ces enfants sont placés, car leurs parents ne peuvent plus s’occuper d’eux. Parfois ce sont les parents eux-mêmes qui viennent nous trouver pour parler de leur situation, parfois c’est le juge qui prend cette décision. Au total, notre structure compte dix enfants. L’équipe d’éducateurs est composée de cinq à six personnes qui assistent les enfants jour et nuit.

Aller plus loin

C’est un travail énergivore : chaque enfant doit faire face à ses propres problèmes. Après dix ans, j’ai eu l’impression de me heurter à mes propres limites. Je faisais ce que je pouvais, mais cela ne me paraissait jamais suffisant. Je voulais aller plus loin. L’encadrement parental, par exemple, ne fait pas partie de nos compétences, un vide que j’aurais adoré pouvoir combler. Il m’en fallait plus, j’avais besoin d’élargir mes connaissances sur le sujet afin d’aider davantage les enfants. Je voulais m’imprégner de leur vécu, comprendre leurs problèmes ainsi que ceux de leurs parents.

J’ai donc décidé de reprendre mes anciennes études. J’ai opté pour une école supérieure qui dispense des cours deux jours par semaine, de 13 h à 21 h. La formation est très pratique et répond à mes exigences. Seule difficulté, mes camarades ne partagent pas tout du tout la même vision de la société que mes collègues. La formation est fournie par VIVO, un organisme qui encadre les personnes du secteur social. Concrètement, je ne dois pas travailler pendant mes études. Je suis toujours considérée comme employée, je perçois encore mon salaire et, en parallèle, un remplaçant rémunéré par l’organisation a été nommé pour assurer mes fonctions.

La pression de la reprise

Reprendre les études n’est pas facile. Je subis beaucoup plus de pression. Je ne veux pas échouer étant donné que mes études sont en partie financées par l’organisme. Mais mon travail semble porter ses fruits et mes résultats sont à la hauteur de mes exigences. Entre-temps, j’ai eu un bébé ! Après avoir accouché, je me suis accordé un break de 6 mois pour prendre soin de ma famille.

« Je ne regrette pas d’avoir repris le chemin de l’école. »

En février, je commencerai mon dernier semestre. J’espère pouvoir terminer mes études en juin prochain. Ensuite, j’aimerais revenir sur mon lieu de travail, tout en exploitant mes nouvelles compétences afin d’aider au mieux les enfants ainsi que leurs parents. Quoi qu’il arrive, je ne regrette pas d’avoir repris le chemin de l’école. Cette décision était mûrement réfléchie, je n’aurais pas été épanouie si j’avais dû continuer ainsi. Aujourd’hui, je me sens différente, enrichie et, surtout, plus légitime. Je suis plus à l’aise dans mes baskets et je réalise que mon point de vue compte. »

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