Familles recomposées: comment apprendre à vivre avec les enfants de l’autre?

La famille classique n’est plus la norme. Ceux qui se lancent dans une nouvelle histoire d’amour à 30 ou 40 ans doivent souvent composer avec les enfants de leur nouveau partenaire. Nous avons abordé avec Aurore Gilquin, sexologue spécialisée en science de la famille et en thérapie systémique, trois situations complexes couramment vécues par les beaux-parents.

Contrairement aux familles classiques, quand une famille se refonde, c’est toujours sur les cendres d’une rupture ou d’un deuil. En plus, là où un couple « biologique » se consolide avant d’avoir des enfants, ici, ils sont déjà là. S’engager dans l’aventure de beau-parent, c’est marcher en funambule sur un fil deux fois plus fin que celui de parent. Il faut sans cesse chercher l’équilibre et accepter de revoir ses schémas, ses rêves, son confort. La posture de victime ? Oubliez !

Cet article fait partie de notre dossier psycho paru dans le magazine d’avril. Pour y accéder gratuitement, il vous suffit de vous inscrire ci-dessous.

ÉDUCATION / RÈGLES DE VIE

Chloé, 43 ans : « Ma belle-fille Victorine a reçu un GSM de sa maman pour ses 10 ans. Mais pour mon fils, qui a 10 ans aussi, je trouve qu’il faut attendre les secondaires. Il est furieux ! »

Les règles de vie commune et l’éducation des enfants sont deux choses distinctes. L’éducation — choix d’école, des activités extrascolaires... — reste la responsabilité
des parents. Mais entre les quatre murs de la famille recomposée, on a besoin — encore plus qu’ailleurs — d’un cadre précis de fonctionnement (où les ex n’ont d’ailleurs pas à intervenir). Fusionner deux familles, c’est comme fusionner deux sociétés. Dans le monde de l’entreprise, une fusion commence toujours par une longue période
de réunions : on doit décider et officialiser le cadre commun, le rôle et le mandat de chacun. La façon de se tenir à table, l’usage du GSM, le choix du vocabulaire :
aux adultes de la maison de les négocier en amont, et ensuite les formuler d’une seule voix aux enfants.

Dans le cas de Chloé : Victorine pourrait utiliser son GSM chez sa maman mais le déposer dans un panier en arrivant dans la famille recomposée... et ce, jusqu’à ses 12 ans. À moins que Chloé n’accepte de descendre l’âge du GSM à 11 ans. Les règles font souvent grincer des dents, mais à terme, on se félicite de les avoir tenues. Les enfants ont besoin d’un cadre clair : cela les rassure et évite les renégociations incessantes et stressantes. Il est même utile d’afficher les règles au vu de tous, sur le frigo par exemple, et de les rappeler au début de chaque période ensemble. Pourquoi pas autour d’un apéro ?

ZONE TAMPON

Virginie, 39 ans : « Quand nos enfants arrivent de chez leur autre parent, je les trouve soit fuyants, soit super excités. Je ne les reconnais pas. Et quand l’ex de Jacques vient chercher ses filles, ces dernières se mettent à me nier, alors qu’une heure auparavant, elles étaient sympas ! »

Les lieux et moments de changement de famille peuvent être comparés à un terminal d’aéroport pour les enfants. Comment vous vous sentez juste avant de prendre un avion, ni tout à fait partie ni déjà arrivée ? Respectez une période tampon, qui peut aller jusqu’à 24 heures, où l’enfant sera peut-être plus silencieux ou plus agité. Vous pouvez même lui verbaliser que cet état est normal et que vous l’acceptez. Lorsque les enfants sont en présence de leurs deux parents, aux changements de maison, ils ont tendance à porter le masque qui les met à l’abri de blesser l’un ou l’autre. Souvent, ils vont protéger le parent qu’ils pensent le plus fragile. Le conseil à Virginie serait de valider avec ses belles-filles qu’elles peuvent enfiler le masque de leur choix quand leur maman arrive et qu’on retiendra plutôt ce qui s’est passé pendant la semaine ensemble.

ÉVACUER LE TROP-PLEIN

Frédérique, 50 ans : « J’essaie d’être juste avec ma belle-fille, mais avec ses caprices, elle fait tourner son père autour de son petit doigt. Je finis par la prendre en grippe et par souhaiter qu’elle reste en permanence chez sa mère... »

Qui a dit qu’il fallait aimer ses beaux-enfants de la même façon que ses enfants ? Les émotions, cela ne se contrôle pas. Ce qu’il faut viser, c’est être juste. Et quand les sentiments de colère, de peur, de tristesse sont là, le pire consiste à s’empêcher de les ressentir : c’est le meilleur moyen de fabriquer une bombe à retardement qui exploserait dans un moment très mal choisi. Pour canaliser et évacuer ces émotions fortes, rien de tel que d’avoir de bons amis eux aussi beaux-parents qui peuvent comprendre ces pensées interdites. Il n’y a qu’avec eux (et avec un psy) qu’on peut lâcher de défoulantes horreurs sur l’ex de notre homme et ses insupportables morveux ! Une fois le sac vidé, on repart souvent plus constructifs.

Image cover: (c) Week-end en Family (Disney+).

+ de sujets famille:

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu des partenaires

Contenu sponsorisé