En couple, ils travaillent pour des partis politiques différents
De la répartition des tâches aux sorties en « célibataire » : chaque relation a ses règles plus ou moins implicites. Mais les couples qui sortent des sentiers battus ont tout intérêt à opter pour des engagements clairement exprimés. Par Lisa Gabriëls, avec la collaboration de Laura Swysen.
Jo (50 ans) et Elisabeth (47 ans) sont tous deux très engagés politiquement, mais dans des partis différents. Valeurs libérales pour l’un, écologistes pour l’autre : chacun doit mettre de côté ses convictions dès qu’il franchit le seuil de la maison. Et loin de les éloigner, ces différences ne font que renforcer leur couple.
« We agree to disagree »
Elisabeth : « Nous n’avons pas informé nos partis tout de suite, nous voulions prendre notre temps. Même dans une relation “classique”, il faut attendre un petit moment avant de le crier sur les toits. Lorsque nous avons senti que les choses devenaient sérieuses entre nous et que nos familles, dont nos enfants, étaient à l’aise avec cette idée, nous avons annoncé la nouvelle à nos présidents de parti. »
Jo : « Après cette annonce, nous nous sommes appelés : “Alors, comment ça s’est passé de ton côté ?” Sortir avec un membre d’un autre parti n’est pas interdit, mais c’est loin d’être évident. Heureusement, nos présidents se sont montrés très humains, ils nous ont même souhaité bonne chance. L’avantage, c’est que nos partis partagent la même humanité. Nos avis divergent sur de nombreux aspects, mais nous nous rejoignons aussi sur un tas de points. »
Elisabeth : « Au début, nous avions décidé de rester discrets sur notre couple. Pas seulement pour des raisons politiques, mais aussi parce que nous avions tous les deux des enfants adolescents et que nous sortions d’une longue relation. Lors d’un gala de son parti, je prenais moi-même des photos afin de ne pas me retrouver dessus, et inversement. Nous nous méfiions aussi des journalistes. Mais cela fait maintenant huit ans que nous sommes ensemble et nous constatons que ce clivage politique est plus présent dans nos esprits que dans celui des autres. »
Nous nous sommes accordés sur un point essentiel : ne pas essayer de convaincre l’autre.
Jo : « Quand Elisabeth a dit en plénière, au cours d’une discussion animée sur la réforme de l’enseignement secondaire, que ce programme était suspendu au- dessus de son lit, je l’ai reprise en disant : “Juste pour être clair, ce projet n’est pas affiché de mon côté du lit.” Je n’aurais jamais osé faire ce genre de remarque au début de notre relation. »
Elisabeth : « Étant tous les deux passionnés par notre métier, nous ne pouvions imaginer ne pas parler politique entre nous. Mais nous nous sommes accordés sur un point essentiel : ne pas essayer de convaincre l’autre. Il m’est arrivé, un jour, de lui demander de laisser certains dossiers au bureau. Concernant les sujets plus délicats, comme la religion, notre principe de base, c’est : “we agree to disagree”. »
Jo : « Il y a beaucoup de compréhension dans notre relation. Nos programmes peuvent être bousculés, nous savons que l’autre ne sera pas fâché. Par exemple, pour nous, les vacances, c’est sacré, mais nous avons dû légèrement contourner cette règle lorsqu’Elisabeth a voulu devenir cheffe de groupe. Nous allions au mont Ventoux et elle a travaillé sur son téléphone portable durant tout le trajet. Déroger à ces règles peut sembler agaçant, mais c’est justement à travers cette compréhension et cette indulgence que nous prouvons que nous nous aimons vraiment. »
Elisabeth : « Le seul point qui me contrarie aujourd’hui, c’est la distance qui nous sépare. Étant donné que nous sommes tous les deux très impliqués dans la vie politique de nos localités, nous ne pouvons pas habiter ensemble. Ce serait tellement plus économique et pratique de vivre dans une seule et même maison... Après huit années de relation, cela me manque de ne pas avoir notre chez-nous. Notre règle la plus sacrée, c’est peut-être finalement celle-ci : se retrouver et dormir ensemble, chez l’un ou chez l’autre, peu importe l’heure à laquelle on termine sa journée. »
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